Funfaircity propose d’ici à la fin de cette année une mini-série en quatre épisodes consacrée à des lieux bien connus des loisirs urbains. Bowling, karting, laser-game, karaoké, ces lieux urbains désormais « classiques » du divertissement sont largement répandus et attirent un public varié depuis de nombreuses années. Ce sont des lieux de loisirs reconnus, visibles et forts de nombreuses implantations dans tous les pays développés.

Mais loin de se satisfaire de cette position, ces expériences cherchent à se réinventer et à s’adapter aux attentes de leur public. Le panorama des loisirs en général et des loisirs urbains en particulier a en effet bien changé depuis les années ou ces loisirs sont apparus en ville ou dans leurs périphéries. Cette offre y est maintenant en concurrence avec des nouveaux lieux de loisirs comme l’escape game, la réalité virtuelle, le trampoline park ou l’escalade de bloc.

Retour sur l’histoire de ces « classiques » et découverte de leur stratégie pour rester au top ! Le troisième épisode est consacré au Laser Game.


Le Laser Game (en anglais : laser tag) est une activité urbaine très populaire qui existe depuis une trentaine d’année. Sa pratique requiert les éléments suivants :

  • Un grand espace de jeu : le plus souvent couvert, sous la forme d’un labyrinthe, décoré ou thématisé et éclairé en lumière noire avec ou sans brouillard artificiel.
  • Un blaster permettant de tirer sur ses adversaires (deux technologies : le laser plus précis et l’infra-rouge plus économique)
  • Un gilet composé de zones sensibles au tir ennemi. Cela peut aussi être un casque. C’est même parfois l’arme elle même qui est aussi la cible.
  • Des joueurs organisés en équipe et opposés selon différents modes de jeu.
Le laser game, pour ceux qui ne connaitraient pas encore !

L’histoire de la création du laser game est très intéressante. Elle renvoie successivement à une technologie militaire d’entrainement et à un jouet dérivé de l’univers de Star Trek dans les années 70, à un développement d’un mode de jeu en arène dans les années 80 (les centres Photon aux USA par George Carter) puis à un développement mondialisé dans les années 90.

La surface d’un espace de jeu va de 300 à 1 000 m². Actuellement, la plus grande arène de laser game du monde occupe 1 300 m² et peut accueillir 60 joueurs (The Edge, dans l’état de l’Illinois).

Sans aller jusqu’à des salles aussi grandes, la France est loin d’être en retard et compte aujourd’hui plus de 300 salles. Parmi les centres les plus important, Laser Game Evolution de Créteil Soleil (1 500 m² avec cinq labyrinthes) ou Lazzer City (1 600 m² en Dordogne, hors contexte urbain). Pour le reste, on trouve sur le marché les enseignes suivantes, principalement mais pas exhaustivement :

  • Laser Game Evolution / Laser Lander : entreprise française basée à Grenoble et créée dans les années 90 avec une centaine de sites exploités en France mais aussi à l’étranger (Belgique, Tunisie,…)
  • Megazone : réseau d’indépendants constitués1987 depuis sous la houlette du fabriquant Zone Laser Tag, plus de 900 sites exploités dont une centaine en France
  • Laser Maxx : entreprise Néerlandaise créée en 1995 avec 44 sites en France
  • Laser Quest : entreprise d’origine britannique créée en 1989, avec une grosse trentaine de sites en France.
  • Metropolis Bowling Laser : lancée en 2002 à partir d’un premier site dans le Morbihan, elle compte aujourd’hui 7 centres en France.

Le laser game est principalement une activité de périphérie pour des raisons d’accessibilité et parce qu’il s’associe souvent à des loisirs plus consommateur d’espaces comme le bowling mais il trouve aussi souvent sa place en centre-ville. Il est alors mono-activité, de petite taille ou bien il vient exploiter un local qui ne trouverait d’autres fonctions autrement.

A titre d’illustration, dans l’agglomération de Bordeaux étendue jusqu’au bassin d’Arcachon, on trouve neuf lieux du laser game :

  • Deux enseignes Laser Quest, dont une en centre-ville (quartier des bassins à Flot) et une sur la rocade (Bouliac).
  • Deux enseignes Laser Game Evolution (LGE), sur la rocade (Bordeaux-Nord et Mérignac)
  • Deux enseignes Metropolis avec bowling (Médoc et périphérie nord sur l’A10)
  • Une enseigne Laser Lander (LGE) dans la zone de loisirs de Gujan Mestras
  • Une enseigne Megazone à Andernos, à l’est du bassin.
  • Un site indépendant Lazer Aventures en périphérie nord (avec pistolet/cible, sans gilet)

(1) Bâtiment ancien dans un centre ville (Laser Quest Bordeaux / (2) Bâtiment neuf dans un retail park récent (Metropolis Le Pian Medoc)


Dans son édition du mois de Novembre 2020 la magasine Capital a publié un classement des enseignes « loisirs » préférés des français. Ce classement plaçait deux enseignes de Laser Game en tête pour les « Sensations Fortes » : LGE (Laser Game Evolution) et Megazone. Le numéro trois était l’enseigne d’escalade Climb’Up, souvent citée sur le blog également pour son développement rapide dans le domaine des sport-loisirs.

Cela peut expliquer que, malgré un nombre important et une bonne répartition sur le territoire, les lieux du laser game continuent d’apparaitre. Ce qui est également intéressant, c’est la variété de configuration avec laquelle il se développe :

  • En complément de l’offre d’un nouveau concept de parc indoor familial proposant aire de jeu, espaces d’atelier et brasserie, My Dreamland à Osny (95)
  • Parmi l’offre très importante d’un complexe en projet comme Loisirama à coté de Metz
  • Dans une offre de loisirs associé à un espace commercial comme au sein de Seven Squares bientôt ouvert à Steel (Saint Etienne).
  • Sur des lieux de loisirs urbains de taille plus réduite comme Good Time à Monistrol-sur-Loire où il est associé à un Karaoké et à un restaurant.
  • En « stand alone » comme Factory Games à Bernay.
  • Sur d’autres type d’associations originales comme Laser and Beers à Roanne.

Si l’on se place dans une continuité de l’évolution des loisirs urbains en France, le laser game a représenté dans les années 90 la dernière grande évolution du secteur jusqu’à l’arrivée de l’escape game, à partir de 2014.  Presque 20 ans d’hégémonie comme le loisir urbain le plus innovant !

Et encore aujourd’hui, le laser game bénéficie de nombreux atouts :

  • C’est un loisir connu et reconnu qui dispose d’un modèle économique rodé (plusieurs franchises et fournisseurs sont disponibles pour se lancer)
  • Il séduit beaucoup un public assez jeune qui, du coup, se renouvelle de lui-même.
  • Il est relativement économique à déployer (surface moyenne, infrastructure simplifiée)
  • Il est fiable et facile à opérer (équipement technique ayant été redéveloppé plusieurs fois)

Toutefois, comme le Bowling et le Karting, le laser game doit nécessairement se remettre en question et chercher à rester compétitif parmi une offre de loisirs urbains toujours plus importante à proximité des grandes agglomérations. En effet, il y’a aussi des laser game qui rengainent définitivement leurs blasters (comme ici à Annecy).

Quelles peuvent donc être les stratégies de ces lieux maintenant classiques pour s’adapter aux nouvelles attentes du public ?

Une amélioration continue de l’expérience

C’est tout d’abord une amélioration de l’activité en elle-même. Le laser game reste un divertissement appliquant une technologie avancée à un usage de loisirs plutôt remuant.

Invictus chez Laser Quest, Helios 2 chez Megazone, la technologie V3 chez Laser Game Evolution, Evo6 chez LaserMaxx, les grandes marques renouvellent donc régulièrement leur matériel afin d’améliorer la pratique (plus précis, plus léger, gilet plus confortable, …), de compléter l’expérience de jeu (compteur de calorie, écran embarqué,…) ou encore de faciliter l’exploitation (recharge rapide, nettoyage facilité,…).

Le cadre de jeu faisant partie intégrante de l’expérience, plusieurs sociétés sont spécialisées dans l’aménagement ou le réaménagement de laser game : Laserfight, LN2J, Plus de Couleurs,…

Une enseigne comme Laser World (trois sites) se présente d’ailleurs comme « les plus beaux laser games » d’Ile de France et met en avant l’immersivité, l’exclusivité et la diversité de ses décors.

Ce sont enfin les modes de jeu et les accessoires de terrain qui peuvent permettre de créer, à chaque visite, une expérience renouvelée.

Une diversification d’activité

Dans le cas de la création d’un nouveau lieu de loisirs, le laser game est souvent un élément incontournable du programme : B’Fun Park (anciennement Airtix, en Moselle), Seven Squares (Steel Saint Etienne), Level 3 (à coté de Rennes),…

Dans le cas d’un site existant, c’est une extension ou une réorganisation interne qui peut permettre à un laser game d’évoluer vers un petit indoor entertainment center. Il inclut alors des activités nouvelles peu consommatrices d’espace : un escape game (Escape Quest par Laser Quest,…), des simulateurs, un espace de réalité virtuelle (Virtual Maxx par Laser Maxx, Virtual Quest par Laser Quest,…), une arcade vintage, mini-golf, ou d’autres jeux,… Un espace extérieur peut également aussi être mis à profit.

Sur des projets neufs, c’est parfois une recherche de renouvellement plus en profondeur avec une nouvelle offre combinée. Par exemple l’expérimentation Yoomoov Station par Laser Game Evolution lors de l’ouverture de Vill’Up, ce centre commercial très fortement orienté loisirs. Ce site offrait à son ouverture six attractions dynamiques et interactives sur un thème de voyage spatial, dont un laser game bien sur. Une offre ambitieuse qui n’a semble t’il pas trouvé son public et qui a forcé son exploitant à rechercher une autre formule, en cours de réalisation.

A la découverte de Yoo Moov (2017)

Une conversion à la réalité virtuelle ?

Difficile en effet de ne pas faire un lien entre le laser game « traditionnel » et les activités naissantes de réalité virtuelle en exploration libre (free roaming VR) dans une application PVP (player vs player). En effet, un nouveau jeu comme par exemple Versus (Phenomena) se présente directement comme un laser game virtuel.

Le laser game de demain ?

Si l’activité peut être considérée comme très similaire (jeu par équipe, aire de jeu virtuelle labyrinthique, arme, …), on ne trouve pas encore d’exemple de laser game ayant abattu toutes les parois de son labyrinthe fluo pour créer une vaste arène de réalité virtuelle.

Plusieurs facteurs peuvent en effet l’expliquer :

  • La réalité virtuelle en free roaming est loin d’être une activité grand public tandis que le fond de commerce d’un laser game est bien établi depuis plusieurs années. Tout changer serait donc un pari très risqué.
  • Les acteurs ne sont pas les même entre des exploitants « historiques » de laser game et des sociétés nouvelles de la réalité virtuelle à grande échelle (EVA via le monde de l’eSport par exemple).
  • Le confort des casques s’améliore en continu mais ils sont encore lourds, surtout pour un jeune public.
  • Enfin, également concernant le jeune public, trois années séparent les âges minimums recommandés : 1.20 mètre et 7/8 ans pour le laser game avec 11/12 ans pour la réalité virtuelle. Un rapide coup d’œil à une pyramide des âges de notre pays montre que cela équivaut à environ 2.4 millions d’enfants. Un public dont on ne peut naturellement pas se passer…

De fait, ces activités semblent avoir plutôt un intérêt à vivre ensemble. Soit dans un même site de loisirs, en complémentarité d’offre (cf. ci-avant) soit dans deux adresses totalement autonomes. Ce qui est plutôt positif !

Une évolution hybride ?

Considérant ce qui précède, impossible de ne pas citer l’idée de la startup Montpelliéraine Bigger Inside. Sa création Protocol 223 est un jeu compétitif pouvant opposer deux équipes de quatre joueurs dans un labyrinthe. Funfaircity l’avait mentionné dans sa veille du mois d’Avril 2020

Une des grandes spécificités de ce jeu est qu’il est prévu pour fonctionner dans un environnement de labyrinthe réel quand, on l’a vu, d’autres applications de réalité virtuelle en exploration libre (VR Free Roaming) exploitent un grand plateau dégagé de tout obstacle.

Contacté par Funfaircity, Benjamin Rolland de Bigger Inside nous expose le principe du jeu : 

Pour le développement de son jeu compétitif, nous avons rapidement visé les salles de laser game « traditionnelles », et ce pour plusieurs raisons : 

  • Pour permettre une forte accessibilité des expériences VR : il y’a plus de 300 salles en France, qui fonctionnent toujours. Certaines ont pourtant une trentaine d’années. Elles pourraient accueillir de nouvelles activités sans pour autant renoncer aux anciennes et avec un investissement maitrisé. 
  • Pour favoriser une diversité des visiteurs : Les salles de laser game sont connues d’un certain public (plutôt jeune pour les anniversaire, les EVG/EVJF) et pourraient en toucher un autre avec de nouvelles activités en réalité virtuelle (entreprises en B2B, jeunes actifs,…). Gagner un nouveau public permettrait ici une meilleure exploitation du lieu. La réalité virtuelle n’étant pas adaptée aux enfants de moins de 12 ans, conserver un mode laser game traditionnel permet aussi de ne pas perdre ce public. 
  • Pour améliorer la qualité du jeu, justifiant de sortir de son domicile. Sentir une paroi à la fois en réel (avec ses mains) et en virtuel (via son masque) augmente le sentiment d’immersion et donc la qualité de l’expérience. En effet, cela augmente les sens mobilisés et « trompe » d’autant plus le cerveau qui va croire à ce qu’il voit. 
  • Pour différentier l’expérience de celles émergentes sur le marché et qui visent soit un grand plateau de free roaming (EVA, Zero Latency), soit une immersion plus narrative ou contemplative qu’active (The Void, Dreamscape). 

Outre ces spécificités, Protol 223, c’est aussi : 

  • Un tracking corporel intégral et jusqu’au bout des doigts via une combinaison d’une vingtaine de capteurs (là encore pour augmenter l’immersion). 
  • Des personnages dotés de capacités et d’action de jeu différentes (fonctions plus défensives, agressives, faculté de voir à travers les murs, …) mais sans accessoire et uniquement par des gestes, paramétrables à l’infini. 
  • Une séance de replay et ralenti des plus belles actions de jeu pour un débriefing convivial en fin de jeu, intéressant sur des activités de team building. 

Le jeu est adaptable à toute salle de laser game sous une durée d’un mois, le temps de modéliser la salle, de paramétrer le jeu, de fabriquer les combinaisons de tracking et de former les exploitants.  Naturellement, ce jeu n’est pas réservé aux salles de laser game. Un établissement qui voudrait accueillir l’expérience aura simplement à construire un labyrinthe. 

(propos recueillis par téléphone)

Sur la base d’une arène de jeu mobile de 80 m² dédié aux salons (et notamment présentée au IAAPA de Paris en 2019) et de son centre de jeu vitrine de Montpellier, Bigger Inside cherche maintenant à proposer son produit aux exploitant de laser game afin d’opérer la jonction entre le laser game et la réalité virtuelle, le classique et l’innovation.

En extérieur ou à domicile

Faculté déjà offerte avant la crise sanitaire, la laser game peut aussi se pratiquer en extérieur et/ou à la maison. C’est même une des pratiques d’origine mais elle est surtout exploitée dans des espaces de loisirs hors des villes (Jumping Forest, Laser Park,…), quand en agglomération c’est surtout la version indoor qui s’est popularisée. C’est pourtant moins douloureux que le Paint Ball !

La mise à disposition de matériel et d’un animateur (Laser Game Challenge, Laser Camp) permet également de pratiquer ce loisirs dans pratiquement tous les types de lieux.

Et une offre comme Mobilaser (avec Laser Game Evolution), permet même de déployer un labyrinthe couvert gonflable.


En conclusion, plusieurs points sont à souligner :

D’abord, les français sont fidèles à leurs loisirs. Bien que trentenaire, cette forme de loisirs poursuit son développement et les idées ne manquent pas tant pour le contenu (jeu et expérience) que pour le contenant (labyrinthe, lieu de pratique,…) comme, on l’a vu, pour le karting.

Ensuite, le laser game montre qu’un loisir « technologique » hors domicile peut rester au goût du jour si l’aventure est à la hauteur. Malgré des expériences de jeu de plus en plus nombreuse, qualitatives et variées au domicile ou en dehors, aller se faire une partie de laser game reste une habitude bien ancrée.

Enfin, l’analyse du développement de l’escape game au regard de celui du son grand prédécesseur le laser game est intéressant à plusieurs égards.

  • D’un coté, il montre que l’escape game a probablement encore de beaux jours devant lui.
  • De l’autre, il montre que l’escape game a probablement atteint en cinq ou six ans le stade de développement et de diversification que le laser game présente aujourd’hui après trois décennies (renouvellement des expériences, réseaux de franchise et de fournisseurs bien établis, variété des lieux de pratique, transition vers la réalité virtuelle, association à d’autres loisirs en un même endroit, développement des applications à domicile,…).

Une situation qui montrent bien le désir de loisirs de la population et des perspectives qui seront donc passionnantes à suivre !

Y’a plus qu’à y aller… à l’assaut !

Le classique du divertissement reviendra une dernière fois le mois prochain avec un article consacré au Karaoke.