Kidzania est un concept parc d’attraction indoor réservé aux enfants (de 4 à 14 ans). Sur une surface conséquente d’environ 7 000 m², il leur propose la reconstitution d’une ville à leur échelle et leur offre d’effectuer une centaine de professions différentes allant de pompier à laveur de carreau et de tester des activités plus ludiques (musique, pâtisserie, grimpe urbaine,…). Deux reportages de présentation en français ici et là.
Ce type de parc relève de la notion d’edu-tainment (éducation par le jeu) au même titre que certains programmes TV ou certaines animations de musées. C’est toutefois un petit peu plus cher (compter environ 24£/enfant pour 4H de découverte dans le site de Londres). Kidzania met en avant sa politique éducative avec des partenariats et visites de groupe venant d’écoles.
Créé au Mexique en 1999 sur l’idée d’un jardin ou les enfants joueraient aux adultes, Kidzania c’est aujourd’hui 24 parcs dans 19 pays. Les développements internationaux sont proposés en franchise a des opérateurs nécessairement locaux, spécialistes de leur marché et capable d’un apport minimal de 20 millions de dollars US. Kidzania apporte alors les droits, le design, le savoir-faire et l’accompagnement technique et commercial. Créer un parc représente un investissement de 35 millions de dollars US.
Kidzania est largement répandu dans le monde, particulièrement dans les grands pays émergents (Inde, Asie du Sud Est, Brésil, Mexique, Égypte, …) le faible niveau des salaires explique peut-être cette stratégie car les employés sont nombreux dans chaque parc. Il prépare aujourd’hui son arrivée aux États Unis où trois ouvertures sont prévues d’ici à 2020. Seule la Chine semble pour le moment lui échapper.
Kidzania a été plusieurs fois primé par l’IAAPA (International Association of Amusement Parks and Attractions) et par la TEA (Themed Entertainment Association), les instances de référence dans le monde des installations de loisirs. Il a également reçu plusieurs prix en matière de franchising ou de contenu éducatif (School Travel Award 2017-2018 pour le site de Londres).
En Europe on trouve deux parcs : à Lisbonne et à Londres (ouvert en 2015 dans le centre commercial Westfield – nous en parlions ici). Il existe donc un public français qui a eu l’occasion de les tester et d’en publier quelques review lorsque l’arrivée du concept en France a été annoncée dès 2014 après l’arrivée du site londonien et donc ensuite régulièrement reporté. Toutefois, à part quelques anciens articles de presse en ligne, on ne trouve pas beaucoup d’actualité sur le projet (ici, ici et là)
Le site officiel de Kidzania indique pourtant toujours une ouverture prévue « prochainement » à Paris au même titre que dix autres parcs en développement.
Comment ça marche
Le concept de Kidzania va assez loin en développement sa mythologie propre, son dialecte, ses bases constitutionnelles et évidemment sa monnaie – le Kidzos – au cœur du concept. La capitale de cette nation virtuelle est le premier parc du nom, celui de Mexico City (ville où il y’aurait – selon Kidzania – le plus grand nombre d’enfant).
Les enfants sont donc accueillis dans cette nouvelle nation (via un bureau d’immigration) pour une session de quatre heures et sont munis d’un bracelet RFID. Ils ont ensuite un accès libre et autonome à une centaine d’activité en libre accès. Certaines vont leur rapporter des Kidzos et d’autres vont leur en couter. Le solde peut être épargné (à la banque), ramené à la maison ou dépensé dans le Département Store du parc avant de partir. Le cumul sur plusieurs visites permet d’effectuer des achats conséquents (console de jeu,…).
En pratique, les enfants ne pourront pas tout essayer car certaines activités sont longues et ils sont invités à repérer à l’avance les activités qui les intéressent.
Outre le prix d’entrée, le bilan du parc est largement abondé en finance ou en nature par une politique de sponsoring. Les partenariats actuels sont essentiellement le fait de compagnies privées (Michelin, Royal Canin, DHL, Danone, Sony, …) mais ils sont également ouverts, d’après le site officiel, aux organisations gouvernementales et aux ONG. Ils sont évidemment particulièrement adaptés aux lieux d’ouverture et au public comme toute campagne de publicité qui se respecte. A noter que le jeu des partenariats a un impact fort sur les activités proposées aux enfants d’un parc à l’autre.
Le site du parc anglais est très détaillé quant aux activités proposées et – de manière induite – du sponsoring qu’elle exploite (British Airways, Innocent, Cadbury, Renault, Eat Natural, …).
Le fonctionnement de certaines activités prête à réfléchir ou à sourire :
- Les salaires les plus élevé sont pour le laveur de carreau et le recyclage des vêtements
- Il faut payer pour être chocolatier ou pompier
- Le présentateur TV (avec Al Jazeera) gagne autant que le technicien de studio
- L’université (et le diplôme) est payante mais permet de gagner un peu plus pour chaque travail
Le parc dispose de tous les équipements nécessaires à un public familial et à des évènements. Un espace est même dédié aux enfants de moins de quatre ans.
A l’issue du temps imparti, les enfants sont invités à regagner la sortie et à y retrouver leurs parents.
Pistes pour une arrivée en France
Sur la base de ce fonctionnement, les principales critiques émises par le public français ayant pu tester (ou non) cette attraction concernent :
- l’omniprésence des marques, au cœur même du concept. Cela est assumé par le créateur du projet qui indique financer le parc grâce à ce sponsoring afin de maitriser le prix du billet d’entrée.
- La présentation d’activités principalement productives, capitalistes et consuméristes laissant de côté tout un autre pan de la société.
Funfaircity a interrogé Kidzania via son site corporate quant à l’actualité du projet français. Ces questions sont restées pour l’instant sans réponse. Dans l’attente, brève analyse de la situation :
Un contenu adaptable ?
La confirmation d’une ouverture en France ne manquerait donc pas de faire réagir le public, les réseaux sociaux, les médias et même pourquoi pas certains politiques. La présence des marques sur un site de loisirs raviverait alors le souvenir du « temps de cerveau disponible » et le risque de détérioration d’image qui est allé avec.
Une des clés de la réussite d’un parc de ce type devrait alors résider dans l’adaptation du contenu à la suite d’un échange fructueux entre Kidzania, son franchisé local et ses partenaires :
- Professions proposées : la France comporte des métiers, des activités et des statuts bien spécifiques qui pourraient donner des transpositions amusantes dans un monde enfantin ainsi qu’une valorisation auprès d’un jeune public. Les partenaires locaux seraient également force de proposition dans l’optique de valoriser leur image.
- Un autre modèle : La transposition à la culture française pourrait être l’occasion de sortir du schéma travail/salaire pour favoriser le bénévolat, le non marchand et éventuellement l’économie circulaire tout en restant concret pour séduire le public.
- Partenariats ouverts : des chambres des métiers, des acteurs publics de la formation, de l’emploi, des fondations et des ONG pourraient être associés en plus des entreprises.
Ces adaptations permettraient de devancer des critiques quant au modèle d’orientation libérale et capitaliste proposé aux enfants.
Un autre argument plus simple étant qu’une expérience à Kidzania va durer une demi-journée à comparer au temps passé à l’école et à l’éducation familiale. Il est aujourd’hui admis qu’une journée à Disneyland ne va pas persuader les enfants que l’on vit dans un monde enchanté, pourquoi n’en serait-il pas de même pour un parc de ce type après tout.
Au passage, un bon exemple d’adaptation d’un standard à des spécificités locales est celui d’un des « land » de Disneyland Paris : le classique « Toworrrow Land » devenant « Discovery Land » en hommage à Jules Verne et en prenant au passage un thème retro-futuriste plus pertinent que les décors obsolètes du land américain d’origine. Cela a pu contribuer à l’acceptation du projet auprès du public français. A noter que cette époque est toutefois révolue, les nouveaux thèmes étant désormais calqués sur des licences de cinéma (Star Wars, Toy Story, Marvel, Tron, …)
Le lieu :
Par analogie avec les autres développements du groupe c’est vraisemblablement dans un grand centre commercial que s’installerait Kidzania Paris.
Un développement avait été semble t’il tenté dans les années 2000 mais sans succès en raison du caractère novateur du concept et de la frilosité des exploitants de centres commerciaux inquiets d’un manque de rentabilité. La recherche d’un site à Paris, en périphérie ou dans une autre grande ville française se poursuit néanmoins avec un partenaire russe Innova Edutainment, spécialisé dans les contenus en ligne.
Aujourd’hui, trouver une surface commerciale aussi importante (7 000 m²) dans un marché immobilier francilien tendu ne sera pas chose aisée pour une activité de ce type tant en surface qu’en niveau de loyer (et donc de chiffre d’affaire) compte tenu du modèle économique proposé.
A titre de comparaison, le nouveau concept-store des Galeries-Lafayettes pour Carré-Sénart représente déjà 6 000 m² de surface de vente.
Le centre de Paris semble donc inaccessible mais de nombreux sites de périphérie pourraient être intéressés :
- Plusieurs grands malls de banlieue récents (Qwartz, Le Millenaire, SO Ouest, Aeroville) mais en difficulté du fait d’une surabondance d’offre pourraient voir dans ce concept une manière de trouver un nouveau souffle auprès d’un public familial.
- Quelques centres commerciaux d’ancienne génération ont des projets d’extension/rénovation en cours ou à venir (Cergy Les Trois Fontaines, Créteil Soleil, Velizy 2) et pourraient voir dans ce concept une manière de renouveler leur image.
- A plus long terme, une installation dans un grand complexe type EuropaCity pourrait être envisagée car l’offre immobilière peut être adaptée dès la conception à un programme aussi important. C’est par exemple le cas d’une des ouvertures programmées aux USA dans le New Jersey dans le mega-mall « American Dream » de Triple Five Group en 2019/2020, implantation retenue du fait de la taille massive du centre.
Dans tous les cas, une installation d’un parc de cette nature ne passera pas inaperçue.
Nous en reparlerons !