Lundi a eu lieu à Lille un événement professionnel d’un nouveau genre sur un thème d’actualité dans notre secteur : l’immersion. Ni salon, ni conférence, cette journée « forum » placée sous le signe de l’échange se donnait comme objectif de poser des bases de cette discipline nouvelle, très exploitée mais dont les contours sont parfois mal définis. Il était temps d’y voir plus clair !

Les aventuriers du jeu

L’évènement a commencé avec une soirée d’accueil à Orbis Aventure, tout récemment ouvert à Tourcoing dans un espace commercial réhabilité (un ancien Leroy Merlin) et désormais intégralement occupé par des activités de loisirs. Outre Orbis, c’est ainsi TFou Parc et Speed Park qui y ont ouvert leurs nouvelles adresses.

Orbis aventure présente un bel espace thématisé avec beaucoup de cohérence et d’astuce. Autour d’un grand bar central, un vaste espace de restauration et un comptoir à jeux proposant même un service d’aide à la décision pour s’y retrouver dans le catalogue ! Au fond et le long d’un grand couloir, les espaces d’aventure et de jeu « live ». Certaines portes sont ouvertes pour permettre aux non-joueurs de regarder…et d’avoir envie. Malin quand on se souvient que le divertissement c’est autant à faire qu’à regarder.

Enfin, une belle grande salle évènementielle complète l’offre pour accueillir les groupes. Encore en chantier mais ouvert à la visite pour notre groupe, la dernière création d’Orbis : une quête de deux heures à travers plusieurs salles très décorées, impliquant des mécanismes élaborés, des acteurs, des interactions nombreuses et plusieurs surprises … Nous n’en dirons pas plus !

A la découverte des secrets d’Orbis Aventure (Photo : T. Paquin)

Une belle soirée déjà très « immersive » donc afin de donner le ton de la journée du lendemain !

A la recherche des pépites de la création

Le jour de l’évènement et dès l’accueil, on comprend que cette journée dédié à l’immersif … sera immersive elle-même ! Scenario, acteurs, accessoires, … il fallait bien ça ! On compte environ 200 participants, de profils très variés : designer, opérateurs, gestionnaires de lieux, investisseurs, fournisseurs,…

Les séances plénières permettent d’introduire et de donner la parole à plusieurs intervenants de renom. Une introduction brillante de Mael Magat nous rappelle que les expériences immersives n’existent pas objectivement et qu’elle ne le sont que si le public les a ressenties comme telles ! Pour ce faire, on peut compter sur la palette des émotions proposée par Pigalle Tavakkoli qui recommande d’ailleurs de l’utiliser dans toute sa gamme, y compris celle qui peut déranger ! Ou par l’histoire, dont Alain Thys nous rappelle qu’elle peut donner de la valeur et du sens même à l’objet qui semble le plus insignifiant (merci pour la bague !).

L’immersion ainsi déployée peut alors créer de nouveaux « rituels » sociaux pour de multiples occasions, que Makeba Chamry nous expose avec l’exemple du festival participatif. L’immersion peut aussi permettre de faire évoluer le profil des visiteurs des monuments et institutions culturelles qui en font le choix, ainsi que l’exposera Laurent Queige sur la base d’enquêtes concernant comme le jeune public, les familles, le ressenti d’expérience visiteurs.

Le mot d’ordre de la journée…

Arrivent ensuite les ateliers ou une dizaine de tables permettent aux participants de rencontrer des experts et des créateurs sur des sujets variés. Pour ma part, j’ai d’abord assisté à une session sur les notions de droits (Clara Benyamin, CBLF Avocats) forcement associées à tout acte de création, immersif ou non. Et qu’il ne faut jamais négliger, surtout quand on commence à impliquer les IA génératives. Puis, j’ai écouté le retour d’expérience de Joris Auffray, qui est revenu avec beaucoup de transparence sur la création à Paris de The Live Thriller, de The Live Hold Up et sur les raisons de l’arrêt de cette seconde aventure. Les créations de Joris sont rares en ce qu’elle exploitent autant des lieux clos scénarisés que l’espace public qui les relie. Donnant ainsi au territoire, à la ville, un rôle dans l’histoire. L’arrêt de The Live Hold Up a permis de mettre le doigt sur certaines limites de la création immersive, notamment leur complexité vis à vis du public.

C’est ce même thème qui donnera une des sessions plénières les plus intéressantes de l’après-midi, avec un focus sur Hotel Wonderland par Tristan Hupe-Guimaraes et Gunnar de Jong. Cet incroyable et ambitieux lieu du théâtre immersif de 3 000 m² aux Pays Bas n’aura pas réussi à se pérenniser. Rapport au script initial, souplesse de la technologie, attentes du public, un bilan très clair a été partagé montrant ainsi qu’on ne peut pas parler d’échec lorsqu’on en retire et qu’on partage autant de leçons.

James Wallmann (WXO) effectuera une contextualisation de l’immersion dans une approche plus globale de l’économie de l’expérience. Emmanuelle Mordacq de l’agence Neoplaces rappellera aussi le rôle joué par les hôtels dans la notion même de l’immersion depuis les premiers caravanserail sécurisants de la route de la soie jusqu’aux utopies des hôtels de Las Vegas, tout en rappelant ses grandes spécificités comme l’intimité par exemple. David Bassuk m’a quant à lui complétement perdu ! Normal, son intervention portait sur le labyrinthe dans le design narratif !

Enfin, concluant les sessions plénières, Claus Raasted du College of Extraordinary Experiences donnera un exposé décapant sur le rapport à l’argent dans les expériences immersives, basée notamment sur son expérience personnelle. Une approche nécessaire quand on connait les sacrifices que peuvent faire des créateurs talentueux pour lancer leurs expériences.

Retour ensuite sur une seconde session d’atelier au cours desquels j’ai eu l’opportunité de parler des lieux et de leur rapport aux expériences immersives sur une intervention intitulée « Casser les codes des lieux ». Émotions et histoires sont au cœur de l’immersion et les lieux en sont souvent chargés, objectivement ou bien subjectivement. Comment alors leur donner un rôle dans l’expérience ? Sur la base de quelques souvenirs personnels, des lieux favoris des participants et de ceux observés avec la veille Funfaircity, nous avons tenté de comprendre et d’illustrer ces lieux des loisirs qui « cassent » leur code initial…

Il y avait de nombreux autres ateliers, tous aussi passionnants les uns que les autres, mais il fallait bien faire un choix !

La journée approchant de son terme, plusieurs sessions de speed-dating organisées dans les cabines de karaoké permettent de faire connaissance avec les acteurs de la filière et donnent lieu à de belles rencontre ou à de nouveaux échanges avec des contacts de long terme. L’occasion de rencontrer une représentante de Crumble Production, la compagnie qui a brillamment mis en scène Le Bonheur des Dames version immersive au sein même du Bon Marché à Paris. Un bel exemple d’un lieu qui casse ses codes et qui offre plus au moyen de sa propre histoire,… L’occasion aussi de découvrir une association qui organise des expériences immersives « à domicile » en prenant possession de votre propre logement le temps d’une soirée unique.

Enfin le temps du showcase donne la conclusion de la journée tout en offrant un temps de démonstration à certaines expériences comme Onyo ou Spaceventure, cet incroyable cockpit inspiré du Millenium Falcon dans lequel « les enfants ont le droit de toucher à tout ! »

Après un dernier temps de partage, les participants se séparent avec une seule envie, revivre cette même « immersion » l’année prochain !

A la découverte d’Hall U Need

Ces journées étaient également l’occasion de découvrir Hall U Need « pour de vrai » (voir le portrait de Cyril Parenna). Un site de très grande qualité, à la hauteur de sa réputation. Les qualités acoustiques du lieu se sont révélées très utiles lors des sessions ateliers où aucune table, pourtant proches les unes des autres, ne perturbaient les voisines.

La soirée a permis de tester quelques jeux comme le très fun Racing Bug, l’arène Vex et quelques bornes d’arcade.

Deux surprises et découvertes sur place :

  • L’imbrication du FEC dans un espace bâti patrimonial plus vaste comprenant un certain nombre d’autres activités et une offre F&B locale (Brique House). L’accès au lieu ne se fait pas directement depuis le parking mais au travers de ces constructions.
  • Un effet « casino » dû à la moquette de grande qualité mais aussi à l’absence de lumière naturelle dans le complexe, que l’on rejoint au travers d’un grand couloir jouant un rôle de sas. Ainsi on a plus aucune sensation du temps qui passe, c’est très troublant.

Une magnifique journée donc, à plusieurs titres et un grand bravo à toute l’équipe d’organisation !

Toutes les photos de l’évènement au lien ci-après. Laissez y votre email pour recevoir le prochain « Livre Blanc » sur le sujet !

Crédits photos : organisateurs et participants


En bref sur l’actualité de l’immersif :

Le premier Pop-Up de l’expérience sonore Onyo : Du 15 avril au 10 mai, Onyo ouvre son premier pop-up expérientiel, Le Monde d’Onyo, aux Halles 1&2 sur l’île de Nantes. Ce pop-up accueillera deux expériences, L’ARBRE-SOLEIL, et LES GARDIENS DE LA MONTAGNE pour un moment de reconnexion et d’évasion merveilleux.

Labyrinthe du 19 mai au 20 août 2023 : Après le succès de l’expo Le Labyrinthe de Tim Burton à Madrid (Espagne), l’exposition immersive évènement consacrée à Tim Burton s’installe à Paris, à l’Espace Chapiteaux de La Villette (Paris 19).

Phantom Peak (Londres) a lancé sa deuxième saison dans un espace plus grand d’environ 3 000 m².

Paddington Bear Experience est annoncée à Londres pour cette année. Une actualité qui pose la question du type de public avec un personnage autant apprécié des adultes que des enfants.

Attraction / immersion, enfin : le Flying Theater FlyOver Chicago est confirmé pour 2024 au Navy Pier (voir l’article sur les Flying Theaters)

Bonnes decouvertes et surtout bonne immersion !



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